Mercredi, la
Maison du Boutis organisait un
stage d'initiation à l'indiennage
et à la toile peinte. Ces
techniques ancestrales
occupaient de nombreuses
brodeuses en Provence et
Languedoc au XVIe et XVIIe
siècle et y ont précédé
l'avènement du
boutis.
Nous avons voulu savoir pourquoi
le boutis s'était imposé.
Questions à Francine
Nicolle, présidente de
l'association Les
Cordelles-Boutis en Vaunage.
D'où
venait la technique de l'indiennage ?
Comme son nom
l'indique, il s'agissait de
toiles imprimées sur des
cotonnades venues d'Inde, un
tissu qui n'existait pas à
l'époque en Europe. Il y avait
une sorte de répartition
géographique de la fabrication
des textiles : ici, nous
produisions de la laine, de la
soie et du chanvre, et les pays
chauds du coton.
Pourquoi l'indiennage s'est-il
répandu dans le sud de la
France?
Parce qu'il a
connu un énorme succès, et qu'il
arrivait à partir de 1648 par le
port de Marseille !
Colbert avait
créé la compagnie des Indes
Orientales pour importer ces
produits. Du coup, des
manufactures se sont créées pour
éviter d'aller chercher ailleurs
ce que l'on pouvait fabriquer
ici !
La région a
connu un développement des
techniques de l'indiennage et
une recherche sur les colorants,
afin de les produire sur place :
le rouge, par exemple, on le
trouvait dans la garance, qui
prospérait dans nos collines.
Mais
alors, pourquoi l'indiennage
« made in Provence » a-t-il
périclité ?
A la suite
d'un « lobbying » (on ne disait
pas ça à l'époque!), les
marchands de laine, de lin et de
soie, ont obtenu de
Louvois, en 1686,
l'interdiction du coton venant
de l'étranger. Ce fut la fin de
l'industrie de l'indiennage,
avec la perte de milliers
d'emplois, d'autant que la
révocation de l'Edit de Nantes,
l'année précédente, avait
contraint beaucoup de chefs
d'entreprises protestants à
l'exil.
Ils avaient
emporté avec eux leur maîtrise
des couleurs, des techniques de
fabrication et leur savoir faire
économique, au profit des Etats
qui les ont accueillis, comme la
Hollande, l'Allemagne,
l'Angleterre,
etc. En fait, le Midi a été puni
deux fois : religieusement et
industriellement !
Comment arrive le boutis ?
Un certain
M. Lebret a
obtenu l'autorisation que les
toiles de coton soient
utilisées, si elles restaient
blanches, puisque la couleur
était toujours interdite.
Pour pouvoir
continuer à travailler, les
brodeuses ont remis au goût du
jour la broderie au boutis, où
elles « emboutissaient » deux
épaisseurs de toile de coton
blanc, pour faire apparaitre le
motif brodé.
L'interdiction de la couleur
était respectée, le boutis avait
retrouvé son rang, et les
brodeuse du travail !
Francine Nicolle présente
quelques indiennes
représentatives.